7 juin 2014 – Maddalena – Palerme (2)

 

 

S/Y AMARANTE

 

7 juin 2014

 

Dans ce petit matin frais et brumeux de la longue traversée monotone, l’œil du marin de quart épuisé qui veille encore, savourant déjà de secouer l’épaule du collègue lourdement endormi, parcourt machinalement les cadrans de contrôle.

 

Stupeur ! La jauge de carburant est à zéro.

 

Le marin d’un coup sort de son état semi-léthargique.

Le « qu’est-ce ? » étant acquis, son esprit analyse aussitôt le pourquoi, le comment, le que faire, tandis que son estomac pourtant endurci proteste.

 

D’un souffle régulier à dominante ventrale basse, fruit d’années de pratique du ZaZen, prestement, l’esprit domine le corps, et les images robertredfordiennes extrêmes du plaisancier crasse coulant dans une mer profonde et noire tandis que brûle son radeau de survie à la surface, dans les éclats des lampes de recherche, s’estompent pour laisser place à une froide analyse de la situation. 

 

Nous sommes un voilier !

 

Tout va bien…

 

Il n’empêche (bon, la pêche, on a donné), il faut prendre des mesures.

 

 

Jauge à main : 100 litres. Il y a 3 jerrycans de 20 litres de secours. La panne sèche est peu probable dans les conditions météo actuelles (SE 3, mer peu agitée). Mais méfi…

 

On met le moteur à bas régime, et on grée même le génois, bordé à plat, hérésie nautique s’il en fût (au fait, plus de rhum à bord), mais gréé ainsi en branque, disais-je, il faut admettre qu’Amarante file ses 5 nœuds, malgré le vent qui baisse.

 

 

 

 

, et nous déroutons vers San Vito Lo Capo (Sud), petit port à la pointe NW de la Sicile, le plus proche.

 

 

SailFish , dit Dabeulioudiforty (WD40), hyperactif survolté des membres supérieurs, nous élimine les petits bruits agaçants de poulies (ça choque son sens de l’esthétique).

 

 

 

 

Tandis que Capo Sud, moi-même  , présentement narrateur de l’aventure, tellement ébahi d’atteindre la côte autrement qu’à la pagaie (ce n’est pas moi qui aurait ramé), prend une photo

 

 

 

 

 

Eh bé vé, on se l’est quand même finie cette traversée, kong.

 

J’ai quand même fait affaler le génois avant l’arrivée : ça faisait plus propre.

 

Les jetées franchies à 19h00, nous allons…. Oui, gagné : au poste à gazole ! Yes !

Il glougloute Amarante, il se gave les fonds de cuve à s’en faire péter les cadènes. La p… de facture est à la mesure de sa soif.

 

Les Bwanas surveillent le compteur d’euros, tandis que les préposés à la pompe à gazole s’abritent de la cannicula.

 

 

 

 

Nous échangeons une poignée de main fraternelle avec Enzo, le chef préposé, trilingue, francophile, euphorique du butin acquis, (et qui aurait bien partagé quelque grappas avec nous), et nous gagnons notre place à quai.

C’est bon, cette fois-ci quand le moteur s’arrête…

 

Nous sautons à terre pour une pizza (une chacun), succulente, dans l’ambiance débridée de la ‘Coucous Fest’ locale (tous les restaurant affichent le couscous au menu, il y a même une grande fiesta du Coussicoussi justement ce soir, un effet gastronomique hérité du passé de l’île, sous domination arabe pendant quelques décennies avant que les normands de Robert de Hauteville en 1091 ne viennent remettre de l’ordre dans la marche de l’histoire et éjecter les intrus).

 

Nous sombrons au retour à bord dans le sommeil lourd des arrivées de croisière.

 

San Vito Lo Capo le 7 juin 2014

 

CAP AU SUD

 

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