24 mai 2010 – Marseille- Bonifacio

S/Y AMARANTE

 

 

Traversée Marseille – Cassis – Bonifaccio.

 

Ce 23 mai 2010, le voyage démarre bien​​ avec les avions qui affichent​​ une demie heure de retard au départ de Nantes et de Paris.

 

Après une attente insupportable, récupération​​ à l’aéroport, de Jean dit l’Espadon et Rémi dit le Barracuda, avec les narines sur le nez, par Bruno dit Captain Trudd.

 

Ici,​​ laisse-moi​​ t’expliquer : Captain Trudd est en fait le héros d’une chanson de marins bien connue :

 

​​ « Matelots le vent est bon,​​ 

La cambuse pleine de jambon,​​ 

Zavon-z-étés​​ si longtemps​​ 

A sec de toile dans le gros temps »

 

Que l’on prend tu le sais bien, en accord de Do Majeur, avec le Capo Dastro à la troisième frette, et le battement si caractéristique du ’tcha-ca-tcha-ca-tcha’ des chants de mer, que l’on effectue sur la guitare d’une main droite enlevée et preste.​​ 

 

Mais revenons à notre récupération. Senteurs de pinède​​ et douce chaleur​​ pour les arrivants, et en route​​ vers le port.

 

A peine les sacs à bord, largue tout, et bourre dedans à 2800 tours pour arriver à temps au Boucan annuel de navigation des Frères de la Côte qui se tient à Cassis cette année.

 

 

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Amarante, le héros de cette aventure, se comporte remarquablement et​​ en route,​​ égratigne l’orgueil de quelques capitaines de barques de moindre allure, à voile ou à vapeur, même pas peur.

Les Frères nous attendent pour le dîner maritime, ripailleur, beuglant, éthylique et sympathique qui leur est coutumier.

 

Amarante,​​ se présente par une manœuvre de manuel d’Ecole d’Hydrographie,​​ et​​ subit une admiration inévitable,​​ tout en restant​​ discret dans ses 16 mètres élégants. ​​ 

 

S’ensuit à bord une nuit d’anthologie, marquée de coups de corne de brume répétitifs, qui, après vérification, s’avèrent être des ronflements, si ce nom peut être utilisé en l’occurrence : mais la sémantique reste hélas pauvre en la matière.

 

Nous appareillons​​ le lendemain​​ à 14 heures, après les vérifications d’usage, et nous dirigeons vers le poste à carburant.​​ 

 

Là, deux barques à boudins occupent l’ouvrage, et obligent Amarante à stationner au milieu du va et vient des vedettes promène-couillons et pilotes de très-gros-moteurs-avec-une-coque-dessus, qui ont du acheter leur permis mer aux puces de la porte d’Aix, en Seljoukide dans le texte.

Sur les barques à boudins, des boudins à barques bronzent leurs 95C, tandis que leurs cakes vitaminés et blanchâtres (on n’est qu’en mai !) gavent les réservoirs de leurs hors-bords de salon nautique tout en tchatchant entre mecs de la taille de leur boudin de zodiac; tout ceci est, foi de marin, bien gonflé.

 

Pendant ce temps perdu, Amarante se tient quasi immobile le cul au vent, barre à zéro et moteur arrière très lente, avec un zeste de propulseur d’étrave, tu sais, celui qui fait ce bruit de riche italien dans les ports.

 

Le plein est fait avec 300 litres de Gasole supplémentaires, et le navire effectue une giration de sortie de quai en culant, puis franchit les jetées à 14h40 et prend la mer en passant par le travers de la bouée d’entrée de chenal à 14h43.

 

 

Les quarts sont mis en place, les règles de sécurité sont rappelées, les matériels de protection individuelle essayés, et les principales commandes de navigation et de contrôle anti collision sont présentées à l’équipage.

 

 

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Le temps de curé qui a prévalu jusque là se maintient : ciel clair avec voile de brume élevé. Vent SSE 8 nœuds.Le​​ moteur​​ est réglé​​ à 2500 tours, avec la Grand Voile gréée en plein au travers. Amarante se cale à 8 nœuds, et frémit de la coque aux compliments appréciateurs de ses marins.

 

Nous doublons​​ le Bec de l’Aigle à 15h15 et mettons​​ en Route Libre.​​ 

 

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Les heures se succèdent, chacun vaquant à ses obligations, ou prenant son quart (ou son bidon).

 

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L’Espadon.​​ 

Il prend le Quart de​​ 3 à 6, le plus rude pour l’homme de veille.

Des années de pratique de la voile. Sa sérénité est un atout pour l’expédition maritime.

 

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Captain Trudd.

Le calculateur prévisionniste méticuleux des grandes options nautiques.​​ 

Quart de 6 à 9. Le quart du matin, celui du Capitaine, du lever de soleil et des valoches sous les yeux.

 

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Le Barracuda.

Son œil d’aigle de mer (Pygargue) détecte l’engin nautique périculeux (on va en Sicile) au-delà même de l’horizon.

 

Malgré les tâches qui occupent​​ l’équipage, la traversée est ponctuée d’un excellent dîner de Carpaccio et pâtes fraiches à l’ail et au basilic, avec un peu de parmesan et puis de l’ail.

Les vins, nombreux et variés, Buzet rouge, Bandol et Côtes de Provence rosés, relèvent le caractère méditerranéen de ce festin. L’ambiance est détendue, les moustiques ne volent plus, effondrés.

 

L’Espadon nous régale de ses enregistrements musicaux et filmographiques une bonne partie de la soirée.

 

Pendant la nuit, Amarante a subi l’habituelle dérive babord au sorti de la ligne de côte des Iles d’Hyères.

 

Ce matin du lundi 24 mai, le temps est calme et brumeux. L’atmosphère est surchargée d’humidité : les haubans pleurent et les drisses se couvrent de perles de cristal.​​ 

Après rinçage des pare-brises à l’eau, la visibilité s’améliore sensiblement, ce qui au petit matin est un signe de réveil de l’intelligence humaine.​​ 

La brume reste malgré tout présente, sous forme de bouchons.

Le ciel au dessus est clair. Le soleil perce par moments et fait alors tomber dans la torpeur. Les épaules se dénouent et on comprend pourquoi on est là.

 

Pendant la nuit, un oiseau de mer,​​ sans doute, a largué son guano à une main du siège de barre : la​​ vraie​​ vie en mer en quelque sorte : une vie faite de danger et d’imprévu.

 

A 09h00, le massif des îles Sanguinaires apparait à l’écran radar à 20 milles au 072°. Il est temps de passer le quart au Barracuda et d’aller à la bannette.

 

 

 

Captain Trudd

 

En mer dès l’aurore, le 24.05.2010 09h36

 

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